L'ancien DAF d'EDF s'explique sur Hinckley Point

L'ancien DAF d'EDF s'explique sur Hinckley Point

Démissionnaire pour désaccord majeur à propos de la construction des EPR britanniques d'Hinckley Point, Thomas Piquemal s'est expliqué devant des députés sur les raisons de sa démission.

Publié le 06-05-2016 par Guilhem Baier

En désespoir de cause

 

Thomas Piquemal s'est exprimé pour la première fois sur les raisons précises de sa démission devant une commission d'enquête parlementaire. Il a confié aux députés un témoignage alarmant, qui va contribuer à renforcer plus encore les inquiétudes déjà très nombreuses et intenses qui pèsent sur l'avenir d'Électricité de France, et plus généralement sur celui de toute la filière nucléaire française. L'ancien directeur financier de l'énergéticien historique a en effet confirmé ce que tout le monde supposait ouvertement, à savoir que sa démission était directement liée au projet de construction de deux réacteurs nucléaires en Grande-Bretagne, sur le site d'Hinckley Point.

Thomas Piquemal l'avoue, avec une émotion profonde et non feinte : « J'ai démissionné en désespoir de cause. En désespoir tout court. Moi, je n'avais pas envie de quitter EDF, une entreprise que j'ai tant aimé défendre ». S'il a choisi de quitter Électricité de France, c'est parce qu'il refusait de « cautionner une décision susceptible, en cas de problème, d'amener EDF dans une situation proche de celle d'Areva ».

 

L'avenir de la filière en jeu

 

La comparaison est dure, mais aussi très inquiétante pour l'ensemble de la filière nucléaire française. En effet, Areva se trouve face à une perte colossale de près de 5 milliards d'euros, contrainte de licencier à tour de bras, et de céder certaines de ses activités, dont celle de construction de réacteurs et d'équipements pour les centrales nucléaires, Areva NP. C'est d'ailleurs EDF qui doit normalement racheter cette activité, actuellement prise au cur d'un scandale. Ce scandale révèle à la fois des falsifications de documents chez Areva NP, et son incapacité à faire son métier de constructeur de cuves et d'équipements, comme en témoignent les défauts de celle de l'EPR de Flamanville.

Dans un tel contexte, Thomas Piquemal estime, à propos d'Hinckley Point, que « le lancement immédiat de ce projet serait mortifère pour EDF et la filière ». L'ancien DAF d'EDF n'est pas hostile en soi au projet, dont il perçoit aussi l'utilité pour son entreprise et pour la filière tout entière, mais il estime qu'il serait nécessaire de le retarder d'au moins trois ans. Cela laisserait le temps pour trouver, notamment, des partenaires industriels et financiers, qui permettraient à EDF de ne pas porter à elle seule 70% du financement du projet.

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