L'affaire « Cahuzac »

Après avoir tant lutté contre la fraude et l'exode fiscal, l'ex-ministre du Budget Jérôme Cahuzac est désormais accusé de détenir un compte en Suisse, transféré depuis à Singapour.

Publié le 25-04-2013 par Emilie Huberth

L'affaire Cahuzac


Le démarrage du premier scandale de l'ère Hollande

Tout avait commencé au début de l'année 2012 avec une procédure de divorce tout à fait classique. Depuis, plusieurs évènements très éloignés les uns des autres ont ressurgi du passé comme pour venir donner tout son corps à ce dossier « Cahuzac » désormais devenu affaire d'état.

En 1980, Jérôme Cahuzac, chirurgien esthétique parisien épouse Patricia, dermatologue de renom, et leurs affaires marchent très bien. Si bien, qu'en 1994, ils achètent ensemble un appartement de 210 mètres carrés sur la cossue avenue de Breteuil, dans le VIIe arrondissement parisien. Un peu plus de deux années plus tard, les Cahuzac créent une clinique à leur nom et en font en peu de temps l'établissement de référence dans la micro-greffe du cheveu à Paris. Comme tous gérants d'endroits incontournables, Jérôme et Patricia voient défiler les PDG de grandes entreprises françaises, des stars du show business et bien évidemment un grand nombre d'hommes et de femmes politiques. En 1997 et après avoir remplumé un grand nombre de têtes connues mais dégarnies, Jérôme Cahuzac est un homme riche. En effet, certains proches déclarent que depuis le lancement de la clinique, il lui arrive de toucher plusieurs millions de francs par an ; mais les activités de chirurgie n'expliquent pas l'intégralité des ses revenus. En effet, Jérôme Cahuzac a su bien monnayer ses conseils auprès des grands laboratoires pharmaceutiques français dont il avait eu tous les contacts lors de son passage, entre 1988 et 1991, au cabinet du ministre de la santé de l'époque : Claude Evin. Créée initialement en 1993, la société CAHUZAC CONSEIL, exploite l'épais carnet d'adresses glanées au ministère et en tire des revenus annuels de plusieurs centaines de milliers d'euros.

Jérôme Cahuzac mène bien sa carrière puisque de député depuis 1997, il passe de la Commission des finances à l'Assemblée Nationale. En mai 2012, il devient le premier ministre du Budget de l'ère Hollande. Sa réputation est celle d'un homme parfois vu par ses pairs comme trop riche pour être un véritable socialiste.

Tout se complique lorsque le couple décide de se séparer et entame une procédure de divorce pour déterminer quel sera le futur partage des biens. Plusieurs avocats vont se succéder à cette lourde tâche, mais une avocate est particulièrement intéressante car elle se nome Maitre Isabelle Copé, qui n'est d'autre que sa voisine dans leurs locaux rue de l'Université mais surtout, la sur du président actuel de l'UMP. En parallèle, des détectives privés sont mandatés pour explorer le patrimoine de Monsieur Cahuzac, ils tomberont rapidement sur des incohérences, l'existence potentielle d'un compte ouvert chez UBS à Genève, des circuits d'argent entre la Suisse et Singapour, etc.

La fameuse bande sonore de Mediapart

Après une enquête privée entre Singapour et Villeneuve-sur-lot ville dont Jérôme Cahuzac est le maire depuis 2001, un mémoire est déposé au tribunal administratif de Bordeaux en 2008 par un certain Remy Garnier. Ce dernier y note l'existence d'un compte suisse détenu par le brillant député. Des lors le microcosme politique s'enflamme autour de cette histoire de compte offshore et en décembre 2012 Mediapart finit par sortir un enregistrement sonore de mauvaise qualité sur lequel on entend une voix dire « Ça me fait chier d'avoir un compte ouvert là-bas. UBS, c'est quand même pas la plus planquée des banques ! ».

Cet enregistrement proviendrait selon Mediapart du répondeur téléphonique d'un notable du Lot-et-Garonne, qui aurait reçu en 2000 un appel non désiré de Jérôme Cahuzac. Le notable aurait apparemment extrait ce message vocal pour le déposer chez son notaire. Mais qui conserverait un document aussi accablant pendant 12 ans ? Tous les regards sont braqués sur Michel Gonelle, maire UMP de Villeneuve sur Lot jusqu'en 2001 et battu aux municipales par Jérôme Chuzac. Bien que Michel Gonelle soit l'avocat de Remy Garnier, ce dernier dément toute implication dans cette affaire et précise à Paris Match que ses relations avec Jérôme Cahuzac sont « cordiales, qu'il n'a jamais rencontré les détectives privés en charge de l'affaire » et se dit même « en colère contre ces accusations ».

En tout état de cause, Jérôme Cahuzac a du démissioné mardi matin de ses fonctions de ministre du budget, laissant derrière lui sa chasse aux fraudeurs fiscaux pour s'engager désormais dans une enquête judiciaire permettant de prouver si cette affaire est une manipulation politique et une véritable fraude fiscale.