Bolloré veut-il recréer le Vivendi de Messier?

Bolloré veut-il recréer le Vivendi de Messier?

Vivendi s'est invité au capital de deux sociétés de jeux vidéos, Ubisoft et Gameloft, des années après avoir quitté le secteur en cédant Activision et Blizzard.

Publié le 16-10-2015 par Laurent Baquista

Stratégie d'abandon

 

Les acquisitions et prises de participation de Vincent Bolloré sont fréquentes, et logiques, compte tenu du trésor de guerre dont dispose le groupe depuis la revente de SFR à Numéricable. Mais elles suscitent depuis quelque temps des interrogations, tant elles semblent en décalage avec la stratégie de Vivendi avant sa prise de pouvoir, et au tout début de son empire. À dire vrai, se séparer de SFR semblait dans la logique de l'équipe précédente, dirigée par Jean-René Fourtou, qui déconstruisait patiemment tout ce que le critiqué fondateur du groupe de médias français avait bâti, à force d'emprunts qui menaçaient de creuser la tombe du groupe. Ce que Messier a fait, je le défais, semblait être le mot d'ordre. Cela passait par un désengagement de certains secteurs, jugés aussi peu stratégiques que rentables, comme celui des jeux vidéos, puis celui des télécommunications. Activision et Blizzard, avaient ainsi été vendus par Fourtou, puis SFR par Bolloré.

 

 

Étranges signes de revirement

 

Mais depuis quelques mois, fort curieusement, Vincent Bolloré donne l'impression de vouloir repositionner son groupe sur des secteurs qu'il avait complètement délaissés. La prise de participation dans le capital de Telecom Italia, puis le renforcement de cette dernière, en sont un premier signe. L'intérêt manifesté pour Telefonica, dont le groupe de médias français possède 1%, en sont un deuxième. Hier, un troisième signe étrange est apparu, lorsque Vivendi a révélé avoir acquis des participations minoritaires dans le capital d'Ubisoft, et dans celui de Gameloft, les deux éditeurs français de jeux vidéos capables de produire des blockbusters du genre. Vivendi s'est ainsi offert 6,6% d'Ubisoft pour 140,3 millions d'euros, et 6,2% de Gameloft au prix de 19,7 millions d'euros.

 

 

Réussir là où Messier a échoué

 

Pourquoi reprendre position sur des secteurs abandonnés? N'y a-t-il pas contradiction avec la stratégie affichée du groupe? Ces questions agitent les observateurs du secteur. Certes, on peut penser, tout simplement, que les désengagements du passé avaient pour simple objectif de désendetter le groupe, et qu'ils n'étaient nullement liés à une intention réelle de se positionner.

Mais on peut aussi se dire que Vincent Bolloré cherche à recréer le Vivendi rêvé par Jean-Marie Messier, où le maître mot était d'allier les tuyaux et les contenus, de façon à maîtriser toutes les chaînes des médias et du divertissement, en allant de la production des contenus à leur diffusion. Un modèle qui avait pourtant conduit Vivendi au bord du précipice. Peut-être Jean-Marie Messier avait-il eu raison trop tôt, et Vincent Bolloré sent-il, en entrepreneur aguerri, que le moment est venu pour donner corps à ce rêve. « Messier en a rêvé, Bolloré l'a fait » pourrons-nous peut-être affirmer dans quelques années.

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